Bélarus : décès soudain du ministre des Affaires étrangères
Le ministre bélarusse des Affaires étrangères, Vladimir Makeï, est mort samedi 'de façon subite', selon l'agence de presse d'Etat Belta. Makeï était en poste depuis 2012 dans l'administration Loukachenko. Compte tenu des circonstances obscures qui entourent ce décès, la presse se demande à qui la mort de Makeï pourrait profiter.
Minsk perd sa figure de proue 'libérale'
Cette disparition aura des répercussions politiques, analyse wPolityce.pl :
«Depuis quelque temps, on entend parler au Bélarus de changements à venir, voire d'une possible démission de Loukachenko, ainsi que de nouvelles tentatives de Minsk pour normaliser ses relations avec l'Europe. Makeï aurait joué un rôle important dans cette nouvelle configuration, ce qui confère à sa mort subite une dimension politique, puisque l'aile dite 'libérale' de l'appareil d'Etat perd ainsi sa figure de proue. Son décès intervient à la veille d'une réunion des ministres des Affaires étrangères de l'OSCE. ... Information de taille, Sergueï Lavrov n'était pas invité à cette réunion. Ainsi, si le ministre bélarusse avait fait acte de sa présence, il aurait envoyé un message politique fort, d'autant que la diplomatie russe avait vu rouge dans le fait que Lavrov n'avait pas été convié.»
Le Bélarus ne déviera pas de sa trajectoire
Sur Facebook, l'économiste et sociologue Vladislav Inozemtsev se demande si cet évènement va changer la ligne politique du pays :
«Comme à Moscou, toutes les décisions importantes à Minsk sont prises par le chef d'Etat et par lui seul. Loukachenko acceptera-t-il que l'armée bélarusse se joigne à l'offensive russe ? Non, car s'il était frileux au printemps 2022, il ne va pas changer d'avis maintenant. Le Kremlin pourrait-il tolérer un changement de pouvoir alors que le pays est son dernier allié ? Je ne crois pas à une telle tactique désespérée - personne ne sait si une passation de pouvoir serait possible en présence d'un tel régime dictatorial. D'autant plus que l'attitude des Bélarusses vis-à-vis du régime actuel et de ses protecteurs moscovites est bien connue.»
Un dilemme implacable
Poutine n'aurait pas pu envoyer un signal plus clair à Minsk, estime Spotmedia :
«Le président bélarusse est dans le collimateur du leader du Kremlin et n'a désormais plus que deux options : se soumettre ou mourir. ... Loukachenko a fait [ces derniers mois] des déclarations hostiles au gouvernement de Kyiv. Il a traité les Ukrainiens de nazis et de danger pour son pays, mais a tout de même résisté aux injonctions de Poutine lui intimant d'y envoyer son armée. ... Or suite à ses défaites en Ukraine, la Russie manque de soldats et de matériel militaire. Ainsi, les centaines de milliers de soldats prêts à combattre que le Bélarus pourrait dépêcher sont une ressource indispensable pour Poutine.»
Le dialogue avec l'Occident mis à mal
Il sera désormais quasiment impossible de dialoguer avec le Bélarus, regrette lb.ua :
«C'est Makeï qui avait entamé des pourparlers avec l'Occident pour assouplir les sanctions visant la potasse bélarusse, en échange de la libération de certains opposants des prisons du pays. ... En fait, ce n'est pas tant la mort de Makeï qui est problématique, mais le fait que le pouvoir bélarusse passe dans les mains du Kremlin. Le ministre défunt ne faisait que mettre à exécution les caprices de Loukachenko. Ce dernier dispose désormais d'une marge de manœuvre très réduite. ... Il est temps d'abandonner l'illusion que l'on peut négocier quoi que ce soit avec le Bélarus.»