Adhésion de la Suède à l'OTAN : Erdoğan en veut toujours plus
Le président turc Erdoğan a une nouvelle fois remis en question l'adhésion de la Suède à l'OTAN lors d'une rencontre des délégations des deux pays à Ankara, mercredi. Bien que la Suède ait durci ses lois anti-terroristes et que la Cour suprême suédoise ait récemment donné son feu vert à l'extradition d'un partisan du PKK, Erdoğan estime que l'OTAN - et tout particulièrement les Etats-Unis, de l'avis des commentateurs - n'aurait pas répondu aux attentes de son pays.
Une affaire qui se joue entre Washington et Ankara
Svenska Dagbladet évoque des négociations de marchands de tapis :
«Ce n'est plus un secret pour personne, et depuis longtemps. La Turquie conditionne l'adhésion de la Suède à la possibilité pour son pays d'acheter des avions de chasse F-16 américains. ... Joe Biden est favorable à l'accord, mais il rencontre certaines réticences du Congrès quant à la vente de F-16 à la Turquie tant que la Suède n'aura pas obtenu le feu vert pour son adhésion à l'OTAN. Les négociations proprement dites, qui ont tout du marchandage, se poursuivent donc entre Washington et Ankara. Et l'on peut résumer ainsi la proposition qu'Erdoğan vient de faire à Biden : Je peux faire en sorte que vous ne perdiez pas la face si vous obtenez du Congrès qu'il autorise la vente des avions de chasse.»
Faire sortir Erdoğan de ses retranchements
Dagens Nyheter compare ces tergiversations à une partie de poker :
«Il faut convaincre Erdoğan de sortir ses atouts avant que les Américains ne le fassent - et lui couper l'herbe sous le pied en l'empêchant d'en demander plus. L'enjeu est en effet de taille pour les Américains. Ils savent pertinemment que l'adhésion de la Suède est de nature à changer la donne sur le plan géopolitique. Elle montre que la porte de l'OTAN est effectivement grande ouverte, et que Vladimir Poutine ne peut pas décider des choix des pays européens en matière de sécurité. Sans compter que ce sera pour l'Alliance un gage de sécurité que la Baltique devienne un jour quasiment une mer intérieure. Ce qui permettra à Washington d'honorer ses garanties de sécurité dans la région plus facilement et à moindre frais. Erdoğan ne pourra donc pas jouer les trublions indéfiniment.»
Les Etats-Unis perdent patience
Denník N tient à rappeler qu'outre la Turquie, la Hongrie continue elle aussi à faire barrage à la Suède :
«Ce refus a conduit le président du comité sénatorial américain des Affaires étrangères à bloquer la livraison d'une commande d'armes à Budapest, pourtant déjà entérinée. ... La Turquie et la Hongrie agissent manifestement de concert. Les deux pays ont approuvé l'adhésion de la Finlande en mars, à quatre jours d'intervalle. Pour la Suède, ils campent sur leurs positions. Ankara exige que les manifestations anti-turques cessent en Suède, tandis que Budapest ne voit pas d'un bon œil les critiques de la Suède sur l'Etat de droit. Alors que la Turquie et la Hongrie placent sans vergogne leurs différends bilatéraux respectifs au-dessus du bon fonctionnement de l'Alliance, les Américains commencent à perdre patience.»