Zone euro : la dernière hausse des taux de la BCE ?
La Banque centrale européenne (BCE) a relevé ses taux directeurs, jeudi, pour la dixième fois d'affilée depuis juillet 2022. Avec ce relèvement de 0,25 point, l'institution de Francfort espère freiner l'inflation, qui s'élève actuellement à 5,3 pour cent dans la zone euro. Les éditorialistes s'interrogent sur les répercussions de cette décision.
Positif pour la crédibilité
Le quotidien Frankfurter Allgemeine Zeitung salue la décision de la BCE :
«L'inflation est trop élevée dans la zone euro. Et même s'il y a un ralentissement de la hausse des prix, les prévisions de 3,2 pour cent pour 2024 sont encore loin de l'objectif souhaité de 2 pour cent. Garantir la stabilité des prix est le mandat de la BCE, et donc sa première priorité. Mais la lutte contre l'inflation n'est pas un but en soi : un fléchissement de la hausse des prix soulagera bel et bien aussi bien l'économie que les consommateurs. Si elle avait choisi de marquer une pause dans ce processus, la BCE aurait galvaudé sa crédibilité.»
Un boulet pour l'économie
Ilta-Sanomat espère que la hausse des taux aura enfin un impact :
«Le marasme soudain sur le marché du logement et de l'immobilier, dans le secteur du BTP et la vente de voitures, notamment, reflète le caractère explosif du ralentissement conjoncturel et montre qu'un léger soubresaut au niveau macroéconomique peut entraîner un contrecoup funeste dans certains secteurs. ... Si la BCE a eu raison de tenter d'endiguer l'envolée de l'inflation, ces hausses de taux massives viennent grever un peu plus l'économie. Il faut espérer que le resserrement de la politique monétaire de la BCE fera effet et contiendra l'inflation - et que les hausses de taux s'arrêteront avant de causer des dommages irrémédiables aux ménages endettés, aux entreprises et à l'économie dans son ensemble.»
La spirale anxiogène s'intensifie
Le quotidien Kurier met en garde contre les effets de cette mesure :
«Ce nouveau relèvement affecte les personnes qui ont contracté des emprunts à taux variables. La plupart d'entre elles supporteront cette évolution. Pour un emprunt d'un montant de 100 000 euros, il faudra s'acquitter de 20 euros de plus chaque mois. Mais la peur générée par cette politique dissuade des secteurs entiers de procéder à des investissements, empêche les logements nouvellement construits de trouver preneurs - les restrictions relatives à l'octroi de crédits en Autriche faisant le reste. La récession ne fera qu'intensifier la spirale anxiogène. Si l'économie se fonde sur les chiffres et les faits, la psychologie joue néanmoins un rôle non négligeable.»
Un ultime tour de vis
Neatkarīgā fait l'analyse suivante :
«Cette décision coûteuse pour les emprunteurs est probablement la dernière du genre pour la BCE, du moins à moyen terme - et c'est plutôt une bonne nouvelle. ... Francfort est elle aussi consciente du fait qu'un nouveau relèvement des taux serait désastreux pour la croissance. ... La BCE table sur une croissance de la zone euro de 0,7 pour cent cette année, de 1 pour cent en 2024 et 1,5 pour cent en 2025. Mais comme on le voit aujourd'hui, l'institution accorde plus d'importance à un objectif annuel d'inflation de 2 pour cent qu'à l'essor de l'économie.»
La politique monétaire n'est pas le seul levier
ABC estime que les gouvernements nationaux ont eux aussi un rôle à jouer :
«L'inflation restant à un niveau élevé, le directoire de la BCE s'est déclaré à une nette majorité en faveur d'un nouveau resserrement de la politique monétaire. ... Les analystes sont toutefois d'avis qu'en raison du ralentissement de l'économie européenne, la politique de relèvement des taux devrait prendre fin prochainement. A ce stade, il faut souligner que la politique monétaire n'est pas l'unique instrument de lutte contre le fléau de l'inflation. Les gouvernements peuvent également modérer leur politique fiscale, réduire les dépenses publiques et engager des réformes susceptibles de renforcer la concurrence sur les marchés nationaux, afin de contenir l'envolée des prix.»