Départ de Martin Schulz : quel impact pour l'UE ?
Martin Schulz ne briguera pas un troisième mandat de président du parlement européen et s'engagera dorénavant dans la politique allemande. On ignore encore la fonction qu'il y occupera. Si certains commentateurs saluent la fin des copinages entre Schulz et Juncker, d'autres redoutent une influence croissante de l'Allemagne en Europe.
Mettre un terme au corporatisme
Le départ de Martin Schulz met fin aux copinages de ce dernier avec le président de la Commission, Jean-Claude Juncker, estime Neue Zürcher Zeitung, qui salue ce renouveau :
«Lorsque fin 2014, les pratiques fiscales de l’Etat du Luxembourg, dévoilées dans le scandale Luxleaks, avaient mis Juncker en difficulté, le très retors social-démocrate Schulz avait fait en sorte que le Parlement européen mette en place non pas un comité d’enquête, mais une inoffensive commission spéciale. Juncker lui a rendu la pareille en appuyant vigoureusement un troisième mandat de Schulz. … Or ce genre de favoritisme flagrant entre les caïds de l’UE nuit à la crédibilité de cette institution. Le groupe des chrétiens-démocrates a bien fait de ne pas dérouler le tapis rouge à Schulz pour un troisième mandat, insistant pour que le président du Parlement européen quitte ses rangs en 2017. Peut-être cela bousculera-t-il l’équilibre politique entre les partis à Bruxelles. Or ce dont l’UE a besoin, ce n'est pas de continuité, mais de sang neuf. Et d’une distance saine entre ses dirigeants et ses institutions.»
Un renforcement de l'hégémonie allemande dans l'UE
Le mandat européen de Martin Schulz n'a pas convaincu Lidové noviny :
«En tant que président du Parlement européen, Schulz a incarné le rôle de l’Allemagne au sein de l’Union. En 1990, Helmut Kohl avait dit que l’objectif n’était pas une Europe allemande, mais une Allemagne européenne, qui aille de pair avec une Europe en cours de réunification. Mais c’est précisément Schulz - bien qu’il soit un européen convaincu - qui a créé l’impression d’une Europe allemande, à sa manière sévère, impatiente et arrogante aussi. … Dans les sphères élevées de la politique allemande, Schulz ne représenterait pas de risque si l’UE fonctionnait comme Kohl le préconisait. Son influence serait contre-balancée par la France et la Grande-Bretagne. Mais dans la situation actuelle, où l’Allemagne reste le solitaire hégémon de l’UE, Schulz incarne précisément cette Europe allemande contre laquelle Kohl a mis en garde.»
Le Parlement perd un vrai Européen
Martin Schulz laissera un grand vide, lit-on sur le site de Deutschlandfunk :
«Même ses plus prompts détracteurs reconnaissent que Schulz a donné au Parlement européen une importance et une voix inédites. ... A chaque fois qu'il a entrevu l'opportunité - même la plus infime - de dialoguer au niveau européen, il s'en est emparé - le plus souvent au nom des élus, parfois aussi pour son propre compte. Le Parlement perd un ardent Européen. ... Il sait manier le langage des 'petites gens' en Europe, alors qu'on ne l'entend habituellement que dans les rangs des anti-UE.»