Traité de Maastricht : quels effets sur l'Europe ?
25 ans après sa ratification, la presse européenne dresse le bilan du traité de Maastricht : constitue-t-il une base adaptée à la coopération actuelle ? L'idée d'une monnaie commune a-t-elle fait ses preuves ? Ou l'euro a-t-il fait plus de mal que de bien ?
Les égoïsmes nationaux affaiblissent l'Union
Le traité de Maastricht n’est pas le fond du problème, souligne Süddeutsche Zeitung :
«Ce sont les égoïsmes nationaux qui affaiblissent l’Union. Quand par exemple des pays comme la Pologne ou la Hongrie jouent la carte nationale dans la crise des réfugiés, l’Europe apparaît divisée. Quand les politiques allemands pestent contre la Commission européenne au sujet de la garantie des dépôts, cette institution perd de son importance. Quand l’Italie ne respecte pas les règles d’assainissement des banques et que la France fait de même pour le plafond de la dette, les accords y afférents semblent inutiles. Il est donc laissé à l’appréciation de chaque capitale de soupeser le pour et le contre des règles du traité à l’aune des intérêts nationaux. Ceux qui assument les accords font le choix de l’Europe. C’est pourquoi on peut dire sans aucune restriction : les Européens ont eux-mêmes leur destin en main.»
Une réussite qu'on aurait tort de négliger
Le bilan nettement positif du traité souligne l’importance qu’il y a à sauver le projet d’intégration européenne, souligne El Mundo :
«Il est indéniable que sur certains aspects, le traité de Maastricht a été plus dévoyé que viable. Il suffit de se rappeler les critères de convergence, surtout bafoués par la France et l’Allemagne. … Or indépendamment de ceci, nous devons reconnaître les effets positifs que le processus d’association de l’UE a apportés à la grande majorité des citoyens du continent. Dans le cas de l’Espagne, les 25 dernières années auraient sans aucun doute été bien différentes si nous n’avions pas dès le début pu nous appuyer sur l’Union économique et monétaire. … C’est pourquoi les politiques et les gouvernement européens doivent redoubler d’efforts pour soutenir un projet qui n’avait jamais été autant compromis par les idéologies xénophobes et totalitaires qu'il ne l'est aujourd'hui.»
L'Allemagne n'est pas la première responsable
Le reproche que le gouvernement américain adresse à l’Allemagne, à savoir que celle-ci s’arroge des avantages commerciaux à l’aide d’un euro nettement dévalué, n’est pas dénué de tout fondement, mais la faute n’en incombe pas à l’Allemagne, juge Corriere del Ticino :
«La faiblesse de l’euro n’est pas imputable à l’Allemagne, mais aux Etats qui enfreignent les règles de l’Union monétaire. Ceux-ci rechignent, malgré des déficits et des dettes publiques excessifs, à prendre les mesures nécessaires pour assainir leurs budgets et leur économie. La Banque centrale européenne (BCE), avec sa politique de taux zéro et son programme de rachat illimité d’emprunts d’Etat, contribue dans une grande mesure à cette négligence. … Mais l’Allemagne a elle aussi sa part de responsabilité. Le gouvernement a beau déplorer la politique monétaire laxiste de la BCE, en claire contradiction avec ses principes, elle accepte au bout du compte la manipulation des taux d’intérêt et ne met pas un terme au rachat de titres obligataires des Etats en difficulté financière.»
Stimuler la demande intérieure
NRC estime lui aussi que la critique formulée par les Etats-Unis est justifiée et appelle une réponse :
«Pour l’Allemagne, le cours de l’euro est trop faible, et [son ministre des Finances Wolfgang] Schäuble préfèrerait lui aussi que le taux de change soit supérieur. Mais l’Allemagne ne peut pas influencer la politique monétaire qui génère ces faibles cours. … L’Allemagne et les Pays-Bas ont longtemps souligné que les pays du Sud devaient améliorer leur compétitivité. Mais inversement, ils ont eux aussi une mission : stimuler la demande intérieure de pays qui ont un important excédent commercial. Berlin - et dans une certaine mesure La Haye aussi - dispose sur ce point d'une certaine marge de manœuvre. Faute de quoi d’énormes excédents commerciaux comme celui de l’Allemagne et des Pays-Bas déclencheront encore plus de critiques. Et celles-ci ne sont pas toujours injustifiées.»