Réduction des émissions de CO2 : peut-on s'en féliciter ?
Les ministres européens de l'Environnement ont trouvé un compromis sur les plafonds d'émissions de CO2 qui seront applicables aux véhicules neufs. D'ici 2030, ils devront baisser de 35 pour cent par rapport à 2021. Sourd à la réduction de 40 pour cent réclamée par le Parlement européen, le gouvernement allemand n'a pas voulu dépasser la barre des 30 pour cent. Certains commentateurs dénoncent un compromis trop édulcoré, d'autres s'interrogent sur la faisabilité de sa mise en œuvre.
Les groupes automobiles l'emportent sur l'environnement
Der Standard s'agace de ce que l'Allemagne, qui fait pression en faveur du secteur automobile, se soit imposée face à l'Autriche :
«Ce que le gouvernement appelle la première grande réussite de la présidence autrichienne de l'UE était en réalité un compromis peu surprenant passé entre Berlin, qui s'était fixé un plafond maximal de 30 pour cent, et Paris, qui faisait campagne pour 40 pour cent. La chancelière allemande Angela Merkel s'était récemment signalée par son rejet d'une réduction plus conséquente, pour ne pas contrarier une industrie automobile allemande qui a un poids politique considérable. Les groupes automobiles peuvent se targuer d'une petite victoire sur l'environnement - en dépit des objurgations du GIEC quant à l'impact des transports sur le réchauffement mondial. Espérons à présent que l'industrie prenne au sérieux les objectifs de réduction de CO2.»
La protection du climat en Allemagne : une mascarade
Le gouvernement allemand freine l'UE en matière de protection du climat, déplore Zeit Online :
«L'argument invoqué est toujours le même, qu'il s'agisse du secteur de l'énergie ou de celui de l'automobile : 'on ne peut pas transformer un secteur aussi rapidement, il faut tenir compte de tous les emplois en jeu.' Le comble de l'impudence, c'est d'affirmer que ceci n'aurait aucune incidence sur les objectifs climatiques, que l'Allemagne ne manquera bien évidemment pas de remplir. Parlons-en, des objectifs climatiques de l'Allemagne dans les transports : ils prévoient une réduction de 40 à 42 pour cent des émissions par rapport à 1990 à l'horizon 2030. De combien ont-elles déjà été réduites ? De rien du tout. Les électrices et les électeurs ne sont pas dupes et se sentent leurrés - les protecteurs du climat tout comme les automobilistes et les employés du secteur automobile, déboussolés dans leurs projets par les changements de cap intempestifs.»
Au-delà des bonnes intentions, quid de la réalité ?
David Barroux, rédacteur en chef du journal économique Les Echos, s'interroge sur la viabilité de la transition vers la voiture électrique, objectif qu'il juge par ailleurs louable :
«Même les voitures électriques ne sont pas des véhicules 'zéro émission'. L'Europe qui tourne majoritairement le dos au nucléaire aura besoin d'électricité pour recharger ses batteries. Et il n'est pas sûr que les énergies renouvelables suffisent à faire face à nos besoins. En votant des lois ou des textes qui ne leur coûtent rien, les politiques se font plaisir en ayant le sentiment d'agir pour le bien de tous. Mais il ne faut pas sous-estimer les éventuels dommages collatéraux de leurs décisions.»