Législatives en Autriche
Les derniers sondages avant les législatives en Autriche donnent une large avance à l'ÖVP de l'ex-chancelier conservateur Sebastian Kurz. Le dernier gouvernement de coalition conservateurs-extrême droite avait dû démissionner suite à l'Ibizagate, impliquant l'ex-chef de file du FPÖ, Heinz-Christian Strache. Le voilà maintenant impliqué dans une affaire de notes de frais. Les éditorialistes évoquent d'autres évolutions préoccupantes dans le pays.
L'absence de programmes est le symptôme d'une crise politique
La campagne s'est surtout caractérisée par une vacuité totale, critique le philosophe Paul Liessmann dans Neue Zürcher Zeitung, ce qu'il explique par
«l'action conjuguée des partis et des médias, qui ne montrent aucune espèce d'intérêt à s'attaquer à ce qu'on appelle les patates chaudes, ou à apporter des idées et des concepts politiques qui auraient mérité un débat de fond. Il est bien plus simple de faire un scandale à propos de problèmes accessoires, à dessein d'attirer l'attention et de ratisser des voix. Or ce vernis superficiel cache une crise fondamentale de la politique. L'ambiance qui prévaut, et ceci ne se limite pas à l'Autriche, laisse entendre qu'il y a consensus général sur les questions décisives, et qu'il n'y a donc pas de raison de mener la controverse.»
Quand les partis conservateurs attaquent la liberté religieuse
Peu avant les élections, les partis conservateurs - dont l'ÖVP "turquoise" de l'ex-chancelier Sebastian Kurz et le FPÖ "bleu" d'extrême droite - ont adopté au Conseil national des motions contre "l'islam politique". Der Standard y voit une atteinte à la liberté religieuse :
«Les résultats représentatifs de l'enquête 2018 Social Survey montrent l'impact dans l'opinion de l'hostilité à l'égard des Musulmans de la politique des Bleus et des Turquoises : 70 pour cent sont en partie ou entièrement d'accord pour dire que l'Islam n'a pas sa place dans le monde occidental. 51 pour cent sont largement ou entièrement favorables à une restriction des pratiques religieuses musulmanes. Cette dernière annonce est particulièrement alarmante car elle montre que dans ce pays, une majorité est contre la liberté religieuse qui, comme tous les droits humains, est inaliénable.»
Kurz a l'embarras du choix
L'ancien chancelier Sebastian Kurz va pouvoir choisir à sa guise ses partenaires de coalition, croit savoir Mladá fronta dnes :
«Kurz peut non seulement compter sur le FPÖ qui avait entraîné les élections anticipées avec son affaire 'Ibizagate'. ... Kurz a davantage d'alternatives. Il pourrait miser sur les Verts qui pourraient atteindre 13 pour cent selon les sondages. Mais il pourrait également obtenir une majorité fiable avec les libéraux des NEOS. Ces partenaires de coalition lui permettraient de se poser en modernisateur, ce qui pourrait adoucir quelque peu son image de conservateur. Il a donc l'embarras du choix.»
Un leader FPÖ tout sauf libéral
Le politologue Gueorgi Kukhaleïchvili analyse les positions du FPÖ et de son leader Norber Hofer et écrit sur 112.ua :
«Hofer n'a jamais été libéral. Il est plus eurosceptique qu'Orbán ou Salvini. ... Pendant la campagne présidentielle de 2016, il a rejeté la signature d'un accord de libre-échange entre l'UE et les Etats-Unis et plaidé pour un référendum sur l'appartenance de l'Autriche à l'UE si la Commission européenne et d'autres organes supranationaux élargissaient leur pouvoir. Hofer est contre l'accueil des réfugiés et contre l'adhésion de la Turquie à l'UE, il préconise une politique migratoire restrictive et l'expulsion de musulmans et revendique le rattachement à l'Autriche de la province italienne du Haut-Adige.»
Le FPÖ déchiré par un nouveau scandale
Selon la presse, Strache aurait facturé des dépenses mensuelles allant jusqu'à 10.000 euros. Ces révélations ont déclenché au sein du parti un débat sur une exclusion de Strache. Wiener Zeitung décrit l'impact de l'affaire pour le FPÖ sur les élections :
«Le FPÖ est devenu une poudrière qui risque d'exploser à tout instant - ou pas. Mais la rupture ouverte avec Strache peut, du moins dans la perspective actuelle, avoir des conséquences imprévisibles : le parti pourrait se mettre à laver son linge sale au vu et au su de tous, ou on pourrait assister à la fondation d'un nouveau parti. Cette évolution aura aussi répercussions inéluctables sur la formation du gouvernement au lendemain des élections : une nouvelle alliance conservateurs-extrême droite est devenue plus improbable encore qu'elle ne l'était après l'Ibizagate. Improbable, mais pas impossible.»
Un FPÖ affaibli ferait le jeu de Kurz
Le portail Azonnali réfléchit aux conséquences d'un éclatement du FPÖ :
«Il serait tout à l'avantage de l'ex-chancelier Sebastian Kurz (ÖVP). Kurz préférerait coopérer avec un reste de FPÖ affaibli, dirigé par la figure plus amène de Norbert Hofer, qu'avec un FPÖ à plus de 20 pour cent des intentions de vote, qui resterait dominé par Hans-Christian Strache et Herbert Kickl. Hofer a été élu à la tête du parti à une large majorité en septembre, mais cette cohésion de façade est trompeuse. Il faut plutôt y voir une trêve temporaire. Si une exclusion de Strache était vraiment à l'ordre du jour et que Kickl ne pouvait participer à un nouveau gouvernement Kurz, les débats reprendraient de plus belle au lendemain des élections.»