Chaos au Stade de France : qui est responsable ?
Les ratés de l'organisation de la finale de la Ligue des champions entre le Real Madrid et Liverpool, samedi, au Stade de France, font polémique. Des milliers de fans sont restés bloqués aux entrées, tandis que la police a fait usage de gaz lacrymogène - environ 200 personnes ont été blessées, 100 autres interpelées. Le président Macron a fait part de ses regrets. Le ministre de l'Intérieur, Gérald Darmanin, a de son côté reconnu des erreurs, tout en maintenant qu'une fraude massive aux billets a été à l'origine des problèmes.
L'action des forces de l'ordre en question
Les supporters anglais n'ont pas été responsables des incidents cette fois-ci, estime Irish Independent :
«Les fans anglais en général, et ceux de Liverpool en particulier, ont mauvaise presse en Europe. Il est vrai qu'ils ne font rien pour redorer leur image, et les incidents qui ont émaillé la finale de l'Euro entre l'Angleterre et l'Italie à Wembley est venue tristement rappeler que la 'maladie anglaise' de l'hooliganisme n'était pas totalement résorbée. Mais même si nous aimons chambrer nos amis anglais et leur comportement souvent inapproprié au stade, force est de constater que les scènes d'une effroyable brutalité observées cette fois-ci ont été le fait des policiers locaux, et non des visiteurs.»
Pas prêts pour Paris 2024
The Daily Telegraph s'en prend à la maire de Paris dans la perspective des Jeux de 2024 :
«Anne Hidalgo prévoit d'accueillir des compétitions olympiques avec des rues piétonnisées, 60 pour cent de places de parking en moins, et la proposition de transformer le pont d'Iéna, qui relie la tour Eiffel au Trocadéro, en un pont végétalisé interdit aux véhicules. A titre d'exemple anticipé de ses prouesses organisatrices, elle avait mis en place samedi dernier, sur le Champ-de-Mars, une fan-zone pour les supporters de Liverpool, sans prévoir ni toilettes chimiques ni poubelles - avec des résultats prévisibles. Ne doutant de rien, Hidalgo a annoncé en grande pompe qu'elle prévoyait de mettre en place des voies spéciales pour qu'athlètes et officiels puissent se déplacer dans la ville paralysée par ses soins. La recette d'un désastre annoncé.»
Le signe d'un climat politique délétère
Le quotidien pro-AKP profite de l’occasion pour critiquer la démocratie française :
«Les carences et/ou le recours disproportionné à la force par la police française lors de différents événements sociaux – émeutes dans les banlieues, mobilisation des gilets jaunes et, dernièrement, compétitions sportives qui dégénèrent - remettent en cause les aptitudes de l'Etat français, de sa démocratie et de son Etat de droit. Quel rôle joue la récente vague populiste française, qui s'efforce d'exclure certains pans de la société, dans la formation d'un climat qui favorise de tels évènements ? Près de 80 pour cent des Français ont voté soit pour des partis d'extrême droite soit pour des partis d'extrême gauche.»
Les caméras intelligentes voient plus de choses
Dans Les Echos, William Eldin, entrepreneur dans le domaine de l'intelligence artificielle, mise sur les nouvelles technologies pour sécuriser les compétitions sportives majeures à venir :
«Il est impossible pour une équipe - aussi nombreuse soit-elle - d'analyser des dizaines de milliers de vidéos au sein d'un centre de sécurité, qui plus est en gestion de crise quand la prise de décision doit être quasi immédiate. ... Les opérateurs ont besoin d'être 'augmentés' par la technologie, tout en conservant la décision finale, notamment pour fluidifier les déplacements de véhicules et de personnes et les accès aux sites, identifier des comportements inhabituels, faire respecter les jauges grâce au comptage de personnes dans les files d'attente, ou encore identifier des actes suspects.»
Revoir la gestion des grands évènements sportifs
Dans son éditorial, Le Monde appelle l'Etat français à tirer des enseignements de la débâcle :
«Le ministre de l'intérieur a martelé ces dernières semaines que la préparation de la sécurité des Jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024 allait constituer le fil rouge de son mandat. Ce qui s'est passé samedi au Stade de France augure mal de cette feuille de route, surtout si le gouvernement s'obstine dans le déni. Il doit en sortir rapidement pour préparer dans les meilleures conditions la Coupe du monde de rugby de 2023. Quant à la cérémonie d'ouverture des JO, qui prévoit d'accueillir le long de la Seine près de huit fois plus de public qu'au Stade de France, ne serait-il pas raisonnable de réviser à la baisse les ambitions ?»
Un problème français
Pour l'historien et consultant Guylain Chevrier, dans Le Figaro, ce ne sont pas la police ou l'UEFA qui sont responsables, mais des pans mal intégrés de la société française :
«C'est l'Etat de droit qui semble ne plus tenir, parce que certains individus aux comportements hors-norme, ne respectent plus des limites qui faisaient, il y a encore peu, le socle de l'éducation, tenant au respect des autres et des biens collectifs. Un problème récurrent, qui s'est enraciné. Mais d'où peut donc venir cet état de fait ? Ce qui nous saute à la figure, c'est, de façon de plus en plus flagrante, une socialisation qui n'est plus là. … Le foot est un sport populaire qui peut donner l'exemple, aider à dépasser les préjugés, pour rassembler, fraterniser. Mais cela n'est vrai que si derrière il y a une société qui a du sens.»