L'Italie va-t-elle entraîner l'UE dans la crise ?
La crise institutionnelle italienne envoie une onde de choc sur les marchés européens. Mardi, les valeurs boursières italiennes ont fortement chuté et le cours de l'euro a plongé. Dans les médias européens, les analystes évoquent l’éventualité d’une nouvelle crise financière et se demandent si Berlusconi, contre toute attente, pourrait être l’homme providentiel.
Prévenir la fuite des capitaux
Le président de la Banque d'Italie, Ignazio Visco, a appelé les partis eurosceptiques - la Ligue et le M5S - à ne pas transformer les élections anticipées en référendum sur l'euro. Un avertissement qui tombe à point nommé, comme l'écrit dans La Stampa l'expert financier Stefano Lepri :
«La peur de voir les emprunts d'Etat italien convertis dans une nouvelle devise, qui ne manquera pas d'être dévaluée [par rapport à l'euro], incite tous les créanciers à s'en défaire. ... Un été placé sous le signe de cette insécurité pourrait engendrer des dommages irrémédiables, avant même que l'on n'en vienne à des élections anticipées. Dans une situation comparables, les Grecs avaient retiré des banques leurs avoirs pour les cacher sous leurs matelas. Le président de la banque centrale a souligné que, si l'on veut éviter que le gouvernement qui devra être formé n'ait plus que des ruines à gérer, il faut empêcher ce scénario.»
Un impact bien plus dévastateur que celui de la Grèce
Pour la première fois depuis 2014, les taux d'intérêts des emprunts d'Etat italiens ont dépassé la barre des trois pour cent mardi. Le quotidien Die Presse est alarmé par les similitudes entre la situation de l'Italie aujourd'hui et celle de la Grèce il y a trois ans :
«Dans les deux cas, une hausse des taux d'intérêts à l'emprunt (comprendre une hausse de l'inquiétude) est considérée comme une intervention indue de l'extérieur. Finalement, les Grecs ont bien été obligés de se plier au diktat de la réalité. Depuis l'été 2015, Tsipras met en œuvre les réformes exigées par les autres pays de l'UE. La situation s'améliore lentement ; en 2017, l'économie grecque a connu une première reprise substantielle et le taux de chômage baisse lentement. Mais avant d'en arriver là, le petit pays qu'est la Grèce a poussé la zone euro au bord du gouffre. Dans le cas de la troisième économie de l'Union monétaire, l'épreuve de force sera bien plus rude pour les autres pays européens.»
L'Italie a-t-elle encore sa place dans la zone euro ?
Les Italiens ne doivent pas être les seuls à s'interroger sur l'éventualité d'un exIT, souligne De Volkskrant :
«La frustration économique des Italiens est aussi compréhensible que les réticences des électeurs des autres pays à payer l'ardoise de l'Italie et de son budget fantaisiste, qui fait fi de toutes les dispositions des accords européens. Il ne faut pas oublier que pendant des années, les Européens ont dû se serrer la ceinture sous le coup des réformes de leurs gouvernements. A l'heure où Macron s'efforce de trouver un compromis entre Nord et Sud sur la question de l'euro, la crise politique italienne place à l'ordre du jour un débat de fond d'une tout autre nature : un pays comme l'Italie, qui suit le principe 'Dépenser et dévaluer', a-t-il encore sa place au sein d'une zone euro dotée d'une monnaie (trop) forte ?»
Quand Berlusconi apparaît comme une solution...
Suite au veto du président Sergio Mattarella et de l'échec de la coalition M5S/Ligue, le M5S a appelé à la destitution de Mattarella. Novi list pointe que même le sulfureux ex-Premier ministre Silvio Berlusconi serait préférable à un pareil chaos :
«L'Italie a toujours été le laboratoire de l'Europe ; de nouvelles solutions politiques y sont testées. Dans ce laboratoire, les choses se sont à tel point emballées que l'ex-Premier ministre Silvio Berlusconi, qui avait dû démissionner au plus fort de la crise de l'euro, semble être un gage de stabilité et de modération. Berlusconi a qualifié d'irresponsable le M5S et sa demande de destitution de Mattarella. Qui sait, peut-être Berlusconi est-il le personnage qui saura trouver l'issue au chaos qui règne actuellement.»