Roumanie et Bulgarie dans Schengen pour de bon
Pour la Roumanie et la Bulgarie, 2025 sera l'année de l'adhésion à part entière à l'espace Schengen. L'Autriche a cessé de s'y opposer et ce jeudi, les ministres de l'Intérieur de l'UE ont levé les derniers obstacles. Jusqu'ici, la liberté de circulation sans contrôle était réservée aux liaisons par avion entre ces deux pays et les autres Etats membres de l'UE. Les commentateurs évoquent la portée de cette mesure.
Un message à l'adresse de la Russie
Kleine Zeitung se félicite de cet élargissement :
«Le fait que la Roumanie et la Bulgarie deviennent membres à part entière de l'espace Schengen à partir de début 2025 est une avancée importante pour la population, qui pourra désormais circuler plus librement au sein de l'UE. De plus, cette perspective ancre la région dans l'Union européenne, un enracinement qui a son importance quand on pense à la sphère d'influence croissante de la Russie et de la Chine. Dernier exemple en date révélateur de ce phénomène, l'épisode de l'élection présidentielle roumaine, manifestement influencée par la Russie, et qui a donc été annulée.»
La disparition d'un levier bénéfique
La suppression des contrôles aux frontières recèle une répercussion moins positive pour la Bulgarie, déplore Club Z :
«Les avantages majeurs de notre appartenance à l'UE ne sont pas tant les fonds européens et la liberté de circulation que le fait que l'UE nous aide à devenir un véritable Etat de droit européen. L'adhésion à Schengen a été un des derniers leviers par lesquels l'UE pouvait nous influencer dans ce sens. Car la Bulgarie n'est pas encore un véritable Etat de droit européen : derrière sa belle façade européenne se cache son essence eurasienne, qui est un tissu d'hypocrisies.»
Une libre circulation toute relative
Même après l'adhésion à Schengen, les frontières de la Bulgarie ne seront pas ouvertes sans restrictions, explique Sega :
«Selon les informations dont nous disposons pour l'instant, les passages frontaliers à destination et en provenance de la Grèce seront grandement facilités. Ce n'est pas peu dire quand on sait que chaque année, les Bulgares effectuent annuellement environ deux millions de déplacements vers la Grèce. ... A l'autre frontière avec un pays de l'UE, celle avec la Roumanie, les choses sont différentes. D'après ce que l'on sait des négociations, les contrôles aux frontières seront maintenus pendant au moins six mois. ... Il faut croire que les Autrichiens veulent mettre en place un autre goulet d'étranglement, en plus de celui qui existe à la frontière entre la Bulgarie et la Turquie, même s'ils ne le disent pas ouvertement.»
De vaines promesses
Salzburger Nachrichten se demande ce que signifie encore l'espace Schengen aujourd'hui :
«Pendant environ deux ans, le ministre autrichien de l'Intérieur, Gerhard Karner, a qualifié l'espace Schengen de 'dysfonctionnel', voire même de 'défunt'. Et ce à chaque fois qu'on lui demandait de justifier le blocage systématique de l'Autriche à l'adhésion de la Roumanie et de la Bulgarie. Les deux pays remplissaient pourtant depuis longtemps les critères requis. ... L'élargissement ne signifie pas une 'résurrection' de Schengen, pour filer la métaphore de Karner. Plusieurs Etats membres continuent de procéder à des contrôles aux frontières intérieures des pays de l'Union. Le refus de répartir équitablement le poids de la politique d'asile et d'immigration est un problème qui perdure. Et la protection des frontières extérieures de l'UE reste insuffisante.»
Schengen pourrait encore beaucoup changer
Pour 444.hu, l'avenir de l'espace Schengen est encore incertain :
«Il y a aussi la question de la nature du système Schengen que la Roumanie va rejoindre. La crise migratoire a amené de plus en plus de pays à introduire des contrôles aux frontières. L'Allemagne s'y est résolue à l'automne, suite à des crimes commis par des immigrés et à l'essor de l'extrême droite, la Norvège en raison du risque terroriste, les Pays-Bas à cause d'une hausse de l'immigration clandestine. ... Personne ne peut dire à quoi ressemblera l'espace Schengen le jour où la Roumanie et la Bulgarie en seront membres.»