Que faire de l'excédent budgétaire allemand ?
En 2016, l’Allemagne a réalisé un excédent budgétaire pour la deuxième année consécutive - de 6,2 milliards d’euros l’an dernier. C’est notamment le résultat de la situation économique réjouissante du pays : le PIB a augmenté de 1,9 pour cent. Le ministre des Finances Wolfgang Schäuble entend rembourser les dettes de l’Etat, mais la CSU et le SPD préfèreraient d’autres affectations. Que faire de cette manne financière ? Les avis des commentateurs divergent.
Il est grand temps de baisser les impôts
Frankfurter Allgemeine Zeitung plaide en faveur de baisses d'impôts, qui seraient dans l’intérêt des citoyens, et explique qu’il n’est pas aussi simple d’augmenter les investissements que le SPD veut bien le laisser entendre :
«Comment serait-ce possible, attendu qu’il s’agit de fonds provenant de l’exercice écoulé ? Dans un budget normal, une fois l’exercice clos, les fonds non dépensés sont caducs. On ne peut pas construire des routes ou rénover des écoles après coup. L’année est révolue, un point c’est tout. … Étant donné qu’actuellement, seule une fraction des fonds prévus pour les investissements leur sont effectivement affectés, cela n’a pas de sens d’en mettre encore plus de côté. L’année écoulée montre par ailleurs que les budgets nationaux et régionaux ne se portent pas si mal. Les présidents de région ne sont pas aussi désespérés qu’ils le clament, et ce à seule fin d’extorquer encore plus d’argent à l’Etat fédéral pour faire face à la crise des réfugiés. … Dans le même temps, les contribuables n’ont jamais été aussi lourdement imposés depuis la réunification. Tout cela montre qu'il est grand temps d’alléger le fardeau fiscal que portent les citoyens.»
Le service de la dette, seul moteur du pays
A l’heure actuelle, des baisses d’impôts seraient tout aussi peu judicieuses que des investissements supplémentaires, met en garde Deutschlandfunk :
«Schäuble et sa CDU préconisent le service de la dette, la CSU des baisses d’impôts et le SPD davantage d’investissements. ... De ces trois propositions, la première est encore la meilleure. Pour ce qui est d’une baisse d’impôts comme celle proposée par la CSU, 6,2 milliards d’euros n’offrent pas une marge d’action suffisante. Du reste, qui sait si ces excédents seront aussi durables que le serait une baisse d’impôts ? A ceci s’ajoute qu’il n’y a pas de véritables revendications de baisses d’impôts dans le pays, le peuple a actuellement d’autres priorités – la sécurité. ... En fin connaisseur de la politique, Schäuble préfère garder les baisses d’impôts comme joker pour les prochaines élections, et il en augmentera la mise encore. En proposant d’augmenter les investissements, le SPD exhiberait sa volonté de mettre la main au porte-monnaie, mais c’est à peu près tout. De l’argent que les sociaux-démocrates ne pourraient pas affecter à des projets concrets, faute de projets aboutis et de personnes capables de les définir. Alors que faire ? Rembourser les dettes.»
Réinvestir les excédents
Plus d’investissements et une exportation du modèle de croissance allemand vers les autres pays du continent européen, tels sont les espoirs nourris par La Stampa :
«Si les données de 2016 se consolidaient en 2017, l’Europe serait en droit d’attendre que la plus forte économie de l’Union lui montre la voie à suivre. L’époque des 'sermons' allemands est révolue ; place à une utilisation européenne des ressources financières et des capacités technologiques impressionnantes dont dispose l’Allemagne. On pourrait reprocher à l’Allemagne d'avoir trop craint que les 'bons' euros de son budget public soient utilisés pour financer les dilapidations 'mauvaises' faites par autrui, tout en défendant certaines zones d’ombre de son système bancaire. S’écarter de ce comportement manichéen ferait du bien à tout le monde. Et en premier lieu aux Allemands.»