Rassemblements et grèves : la pression monte sur Loukachenko
Depuis les présidentielles en Biélorussie, de plus en plus de personnes ont rejoint les défilés d'opposition. Pour la seule ville de Minsk, les manifestants étaient près de 100 000. De plus, les collaborateurs de nombreuses entreprises d'Etat clés se sont mis en grève et plusieurs journalistes de la télévision d'Etat ont fait publiquement part de leur soutien à l'opposition. Cela suffira-t-il pour renverser le chef de l'Etat ?
Les travailleurs pourraient renverser le système
Vedomosti pointe que Loukachenko est en train de perdre le soutien de son électorat traditionnel :
«Le pouvoir étatique tenter d'assimiler la protestation à un groupe social restreint : des hipsters s'étant laissés influencer par la propagande. C'est pourquoi les manifestants tiennent tant à montrer la grande diversité sociale de leur mouvement. Les grèves dans les usines ont rendu un service inestimable à l'opposition, puisqu'elles ont privé les soutiens de Loukachenko d'un argument clé : 'les travailleurs restent fidèles au système'. Un espoir vain pour Loukachenko. Penser que le petit peuple n'osera pas se soulever est une illusion qui avait déjà fait tomber le tsar Nicolas II en son temps, puis le système soviétique.»
La contestation doit se doter de structures
Rzeczpospolita incite l'opposition biélorusse à s'organiser :
«La colère et la contestation ne tiennent qu'un temps. Les jeunes biélorusses doivent tirer des enseignements de l'histoire. Le soulèvement polonais, dans les années 1980, s'était institutionnalisé grâce au syndicat Solidarność et c'est grâce aux solides structures du comité populaire mené par Lech Wałęsa et à des dirigeants bien visibles qu'il avait réussi à imposer ses revendications au Premier ministre Wojciech Jaruzelski en 1989. L'opposition biélorusse doit s'institutionnaliser. C'est le seul moyen pour la nation non seulement de pouvoir regarder le dictateur droit dans les yeux, mais aussi d'y voir poindre la peur.»
Une ambiance de fin de règne
Berliner Zeitung ne croit pas que le président biélorusse puisse compter sur le soutien de Moscou :
«Loukachenko passe pour être un partenaire peu fiable, y compris en Russie. Les jeux de pouvoir auxquelles il s'est livré avec l'UE jouent en sa défaveur, et on dit qu'il aurait des impayés de gaz. La Russie veut avant tout que la Biélorussie reste une zone tampon indépendante et bien disposée à son égard. ... Les manifestants réclament liberté et indépendance, et certains politiques d'opposition entretiennent des contacts avec l'économie russe. L'appel au secours de Loukachenko doit être compris comme une manœuvre stratégique : il tremble pour son pouvoir. Il affirme à présent que l'OTAN prépare une attaque. Et il organise des contre-manifestations. Autant d'éléments révélateurs d'une fin de règne.»
Vous avez dit Biélorussie ?
L'éveil national de la Biélorussie connaît des aléas de calendrier malheureux, déplore Latvijas avīze :
«On peut dire que les Biélorusses n'ont pas de chance, car les événements décisifs pour leur pays coïncident avec un moment où la course à la présidence des Etats-Unis entre dans une phase décisive. Aussi le monde se passionne-t-il aujourd'hui davantage pour la candidate présentée mercredi par Joe Biden au poste de vice-présidente que pour les troubles dans un lointain pays post-soviétique, qui ne s'est toujours pas affranchi du joug de l'héritage soviétique et ne tente même d'y changer quoi que ce soit - comme son voisin ukrainien, qui a déjà toute une série de 'Maïdan' à son actif.»