Slovaquie : un 'roque' gouvernemental sans effet ?
Le gouvernement slovaque tente de redresser la barre en procédant à un échange de postes : le Premier ministre, Igor Matovič, laisse sa place au ministre des Finances, Eduard Heger, et récupère le porte-feuille de dernier. L'achat par Matovič du vaccin Spoutnik V, en dépit des accords passés, avait provoqué une crise gouvernementale. Les partenaires de coalition, qui réclamaient sa démission, ont finalement accepté ce "roque".
La question centrale reste sans réponse
Tout reste opaque dans ce dossier, juge Český rozhlas :
«L'ex-Premier ministre considérait l'achat de vaccins Spoutnik comme l'un de ses plus grands succès dans la lutte contre la pandémie, ce qui n'a pas empêché ses alliés de s'insurger. ... Tant que l'on ne saura pas ce qu'il adviendra du vaccin russe, les changements opérés dans le cadre du remaniement resteront de nature purement ornementale. Rien ne dit que le 'roque' effectué entre l'intransigeant M. Matovič et le sympathique M. Heger, qui aura son prédécesseur sur le dos à chaque décision qu'il devra prendre, peut fonctionner. Il est tout à fait possible qu'une nouvelle crise gouvernementale éclate dans les six prochains mois.»
Maladroit mais pas encore grillé
Malgré ses errements, Matovič pourrait toutefois s'en sortir, juge Polityka :
«Il a d'abord plaisanté à la radio, en soulignant qu'en contrepartie des vaccins, la Slovaquie ne s'opposerait pas à une annexion de la Transcarpatie ukrainienne par la Russie. Puis il n'a pas hésité à dire que ses rivaux s'accommoderaient très bien du fait que de nombreuses personnes perdent la vie. Il a de surcroît remercié publiquement le Premier ministre hongrois, Viktor Orbán, d'avoir assuré la médiation avec les interlocuteurs russes. ... Malgré tout, il est toujours possible que Matovič fasse un retour triomphal une fois la situation revenue à la normale, qu'il se pose en politique qui n'a pas hésité à recourir à des mesures inhabituelles en période de crise.»
Il faut se remettre rapidement au travail
Denník N fait part de son soulagement :
«Il est bon que la coalition tente un nouveau départ. Elle devra non seulement corriger les erreurs de Matovič, mais aussi restaurer la confiance dans l'Etat et montrer rapidement qu'elle sait mieux gouverner que l'administration précédente. ... Le travail de démantèlement des structures mafieuses de l'Etat sous le trop long règne du chef de gouvernement Robert Fico vient tout juste de commencer. Il est important de rattraper le retard pris. De même qu'il est nécessaire et urgent de se mettre vraiment au travail, de manière générale. Car le coronavirus continue de sévir.»
Un important passif à éponger
Ce tour de passe-passe ne se traduira par aucun changement, critique pour sa part Pravda :
«Le fond du problème, depuis le début, c'était le style de gouvernance de Matovič, le chic qu'il avait de ne pas respecter les engagements pris et de provoquer des conflits sans arrêts. Confier le ministère des Finances au Premier ministre d'hier n'aura aucune influence sur son style. ... Alors tout est bien qui finit bien ? Absolument pas. Dimanche encore, il n'en allait pas de la stabilité du gouvernement, mais de survie politique et de pouvoir. L'arrivée à échéance des dettes que ce gouvernement a contractées aux dépens de la société est provisoirement repoussée, mais rien n'est annulé.»