Trump, le dos au mur ?
Les démocrates sont responsables du shutdown et de l'immigration clandestine aux Etats-Unis - voilà, en substance, le résumé du premier discours télévisé de Trump à la nation. Il a de nouveau demandé à l'opposition les 5,7 milliards de dollars nécessaires à la construction d'un mur à la frontière avec le Mexique. Les démocrates y voient un gaspillage des deniers publics. Si certains chroniqueurs comprennent l'entêtement de Trump, d'autres le jugent risible.
Le shutdown, un atout pour Trump
Trump peut tirer parti du shutdown dans le bras de fer avec les démocrates, estime Ekho Moskvy :
«Un gouvernement paralysé à 25 pour cent, c'est un avantage pour Trump dans les négociations. Il prend le gouvernement en otage. Paradoxalement, l'état d'urgence peut s'avérer être une issue pour Trump : il n'aura rien cédé aux démocrates et tout fait aux yeux de ses électeurs pour construire le mur. ... Trump a du reste affirmé à maintes reprises que le Mexique financerait la construction du mur. Il a cependant déclaré, hier, 'ne pas avoir dit ça' et 'avoir voulu dire autre chose'.»
Les électeurs tiennent à leur mur
Sur son blog Cosmovisión, hébergé par le portail du quotidien mexicain Excélsior, Kimberly Armengol craint que Trump ne mette tout en œuvre pour honorer sa promesse :
«Ce mur incroyablement puissant qui doit protéger les Etats-Unis de tous ses ennemis sera fait 'd'acier et non de béton'. Cela nous rappelle les dessins animés de notre enfance, où des barrières dotées de super-pouvoirs protégeaient les gentils des méchants de manière instantanée. Dans un pays qui a tendance à trouver chez les autres les raisons de son propre déclin, les propos de Trump suscitent l'adhésion de nombreux sympathisants. Les électeurs sont impatients de voir se matérialiser le mur imposant et joli qu'on leur avait promis. ... Désespéré, Trump fait son possible pour que soit construit ne serait-ce qu'un kilomètre de ce mur. Il ne serait même pas étonnant qu'il mette lui-même la main à la poche pour en financer une partie.»
Trump en plein 'terrible twos'
Journal 21 critique le comportement du président, qu'il compare à une phase d'opposition que traverse les jeunes enfants :
«Les démocrates ont présenté au Congrès un projet de loi, soutenu également par des républicains, qui prévoit une enveloppe de 1,3 milliard de dollars pour des mesures supplémentaires de protection de la frontière méridionale du pays, dans la mesure où le président est prêt, en contrepartie, à mettre fin au shutdown, qui dure depuis le 22 décembre dernier. ... Or Donald Trump, arrivé à la moitié de son mandat, refuse de céder. Pas étonnant, remarque, cynique, un chroniqueur du 'Washington Post'. ... Le président serait en plein 'terrible twos', une phase difficile de l'enfance dans laquelle le jeune enfant de deux ans, réfractaire à tout, en fait voir de toutes les couleurs aux adultes de son entourage.»
Un mur aux fondations racistes
Bien que les citoyens s'opposent à la construction du mur frontalier, Trump persiste et signe, déplore Telegram.hr :
«La majorité des Américains estiment, à raison, qu'il s'agit d'un projet absurde - le nombre des entrées illégales sur le territoire américain a diminué et il est de l'ordre de 2 000 aujourd'hui. Le nombre de Mexicains qui quittent les Etats-Unis pour retourner dans leur pays est même supérieur au nombre de ceux qui font le trajet inverse, car de nouveaux emplois sont créés au Mexique. Mais Trump se contrefiche des faits en matière d'immigration ; il conçoit la question comme un moyen d'attiser la peur et la haine vis-à-vis des 'non-blancs qui envahissent l'Amérique'. Cette assertion a des fondements racistes, et non économiques. La construction d'un mur est une solution du XVe siècle appliquée à un problème du XXIe siècle.»
Mieux vaut renoncer discrètement aux promesses de campagne
Trump s'obstine depuis trop longtemps à vouloir honorer sa promesse de campagne, juge Karjalainen :
«Trump se trouve désormais au bord du précipice, ou peut-être au sommet de son mur. Tandis qu'il s'autocongratule sur Twitter, il doit probablement être en train de se demander jusqu'où il pourra pousser le bouchon sans y laisser trop de plumes. Le mur à la frontière avec le Mexique, promis pendant la campagne électorale, ne viendra pas ; depuis la victoire des démocrates aux élections de mi-mandat, c'est une certitude. Dans le feu de la campagne, Trump a fait une promesse en l'air, comme à son habitude. Il prend conscience aujourd'hui, à son grand dam, qu'il vaut mieux ne pas faire trop de battage autour des promesses électorales - les politiques expérimentés le savent bien.»
Permettre à Trump de sauver la face
Polityka estime qu'un compromis entre Trump et les démocrates est encore possible :
«Après avoir remporté les élections à la Chambre des représentants, les démocrates se sentent renforcés dans le litige qui les oppose à Trump : ils ont refusé de financer le mur, ce qui a entraîné le gel du projet de budget et une paralysie partielle de l'administration du pays. ... Il faut toutefois que les deux camps fassent preuve d'une disposition au compromis s'ils veulent éviter la confrontation et sauver la face. Il y a une marge de manœuvre, car nombreux sont ceux qui, dans l'équipe de Trump, comprennent son 'mur' de façon métaphorique : un simple renforcement de la frontière plutôt qu'un mur ou une clôture. Le président dispose donc d'une certaine liberté de mouvement. La question est seulement de savoir si les démocrates seront prêt à faire un pas vers lui.»
Trump ne reviendra jamais sur ses mensonges
Trump ne cédera pas, pense Kristeligt Dagblad :
«Il n'a eu de cesse de démontrer que ses sentiments primaient sur les faits. Il sait que la défiance vis-à-vis des médias est telle parmi ses électeurs que la plupart d'entre eux préféreront croire ses mensonges. Les attaques répétées à l'encontre des médias dominants ont montré leur efficacité. De nombreux Américains ont du mal à admettre la 'réalité' que décrivent par exemple The Washington Post, The New York Times ou la chaîne TV CBS.»