AUKUS : un risque accru de conflit dans l'espace Pacifique ?
La marine australienne sera dotée de sous-marins à propulsion nucléaire. C'est ce qu'ont annoncé les dirigeants américain, britannique et australien lundi à San Diego, en Californie. Les trois pays avaient conclu le pacte AUKUS en 2021, dans le but de "renforcer la sécurité dans l'Indo-Pacifique". Une annonce qui a suscité l'indignation de Pékin, qui y voit une atteinte au traité de non-prolifération des armes nucléaires. Les commentateurs s'inquiètent.
Le péril d'une course aux armements
Le pacte ne fera qu'aggraver l'insécurité croissante dans l'Indo-Pacifique, déplore le chroniqueur Pierre Haski dans la matinale de France Inter :
«AUKUS n'a évidemment aucune autre raison d'être que d'organiser le soutien militaire en cas de conflit ouvert avec la Chine, à Taïwan, ou en mer de Chine méridionale. Théoriquement dissuasive, cette approche risque aussi d'être autoréalisatrice, c'est-à-dire d'entraîner toute la région dans une course aux armements déjà bien engagée de part et d'autre, et de placer prioritairement la rivalité sur le terrain militaire. L'Indo-Pacifique est le lieu principal de l'innovation et de la production économique dans le monde ; mais cette concurrence se déroule à l'ombre d'une rivalité stratégique exacerbée.»
Une mondialisation scindée en deux ?
El Periódico de Catalunya se dit peu emballée par le pacte :
«L''anglosphère' s'apprête ainsi à poursuivre sans l'Europe une politique spécifique pour contenir la Chine. ... Le mécontentement du gouvernement chinois était prévisible : il accuse le nouveau pacte d'être responsable d'une militarisation de l'espace pacifique, de violer le traité de non-prolifération des armes nucléaires et d'accroître le risque d'escalade. On a aussi le sentiment qu'il s'agit d'une menace majeure pour la mondialisation économique. Non seulement parce que les échanges commerciaux nécessitent un climat de confiance, mais aussi parce que se profile ici un néo-protectionnisme, qui laisse présager une mondialisation scindée en deux : celle des alliés occidentaux, et celle articulée autour de l'axe Chine-Russie, avec un fort potentiel d'expansion dans le Sud global.»
L'alliance veut montrer sa force
Kleine Zeitung évoque le rôle de l'Australie dans le pacte AUKUS :
«Avec le partenariat sur les sous-marins nucléaires et le pacte de défense AUKUS avec les Etats-Unis et le Royaume-Uni, l'Australie devient subitement un acteur de poids sur la scène internationale. Bien entendu, l'Australie doit d'abord sa présence dans ce pacte à sa situation géographique, qui en fait un lieu stratégique pour les Britanniques et les Américains. Si l'on veut contrer la domination chinoise dans l'Indo-Pacifique, il est nécessaire de disposer dans la région d'une tête de pont, avec laquelle on partage des valeurs démocratiques et culturelles. Or l'Australie répond précisément à ces conditions.»