Espagne : qu'attendre du plan pour le logement ?
Le Premier ministre, Pedro Sánchez, a présenté un plan d'action pour lutter contre la crise du logement en Espagne, qui s'est fortement aggravée. Celui-ci prévoit de mettre les logements vacants à la location, à des prix abordables, via des subventions publiques et des allégements fiscaux ; de lancer la construction, dans un premier temps, de 3 300 logements publics ; de limiter les locations de courte durée destinées aux touristes ; et de mettre le holà à l'achat de biens immobiliers par les citoyens extracommunautaires.
Le fond du problème a été cerné
El Periódico de España affiche un optimisme prudent :
«Le prix moyen du mètre carré pour le bâti neuf a dépassé la barre des 3 000 euros, après une hausse de 5,5 pour cent en 2024 et une hausse de 52 pour cent depuis son niveau le plus bas, après l'éclatement de la bulle immobilière en 2008. ... Le gouvernement veut augmenter le parc de logements sociaux, une solution à long terme qui ne résout pas le problème actuel. Le PP [conservateur] veut davantage de zones constructibles et alléger la fiscalité sur les transactions immobilières, des mesures qui font grincer les dents des experts, car elles sont connues pour être à l'origine de la dernière bulle. Pedro Sánchez et Alberto Nuñez Feijóo ont toutefois le mérite de rechercher des solutions aux véritables problèmes des gens, même s'il leur importe surtout de dominer le débat public.»
Insuffisant pour la majorité des gens
Eldiario.es dénonce des annonces trop vagues :
«L'accès à un logement digne est devenu une véritable chimère pour des dizaines de milliers de citoyens. Les années passent, les responsables politiques détournent le regard et on s'enfonce dans la jungle de la spéculation. ... Aujourd'hui au moins, on consent à évoquer des interventions au niveau du marché, mais dans une mesure limitée. ... Il n'y a pas de véritable plan pour promouvoir les capacités de logement social et accessible dont disposent de nombreux pays européens. ... Si l'on parvenait un jour à cet objectif, la valeur globale des propriétés immobilières en Espagne diminuerait de 30 pour cent, et ce serait la fin du 'rêve espagnol' pour de nombreux spéculateurs étrangers - une perspective qu'aucun des deux grands partis ne tolérera. Et tandis qu'ils continueront à nous bercer de vagues annonces, une grande partie de la société continuera de souffrir.»
Une bonne approche - mais le temps presse
El País insiste sur l'urgence de la situation :
«Le problème du logement est si grave en Espagne que les propositions - à l'image de celles du PP - risquent, dans le meilleur des cas, d'être de simples palliatifs, ou, dans le pire des cas, d'alimenter la bulle immobilière [comme en 2008]. Celles du gouvernement, plus en phase avec les réalités de l'évolution du marché en 2025, pourraient être efficaces d'ici cinq ans. Il faut accélérer les mesures susceptibles d'avoir des effets immédiats, car l'Espagne a besoin d'une action à court terme, avec une ambition à la hauteur du défi qu'elle s'attelle à relever. La tentative de mener une véritable action politique n'en reste pas moins louable, même si elle est encore timide, et doit passer par des propositions à plusieurs niveaux, plutôt que par des mesures à la petite semaine.»
Taxation des acquéreurs étrangers : un dérivatif
Sánchez dit vouloir imposer une surtaxe pouvant atteindre 100 pour cent du prix d'achat aux ressortissants extracommunautaires désireux d'acquérir des biens immobiliers. Une aberration, juge The Spectator :
«On estime à 27 000 le nombre de propriétés achetées en Espagne par des citoyens hors UE l'année dernière. Les retraités britanniques ne constituent qu'une infime part de ce groupe. Pour un pays qui compte une population totale de 48 millions d'habitants, c'est un facteur négligeable. ... Il est tout simplement ridicule d'affirmer que leur fermer la porte fera une différence pour le citoyen lambda espagnol. ... Le véritable problème du logement en Espagne, c'est que l'on ne construit pas suffisamment et qu'il y a trop d'immigrés peu qualifiés. Fermer le pays aux riches désireux de s'expatrier apportera peut-être quelques suffrages, mais ne résoudra pas le fond du problème.»