France : l'IVG, bientôt un droit fondamental ?
Après l'Assemblée nationale, le Sénat a à son tour adopté à une large majorité jeudi l'inscription dans la Constitution du droit à l'IVG. La majorité des trois cinquièmes nécessaire pour entériner le vote lors d'une réunion du Parlement en Congrès, le 4 mars, est considéré comme une formalité. Cette initiative vise à rendre irréversible le droit des femmes à recourir à l'IVG. La presse n'est pas unanime quant au bien fondé et à la portée de la mesure.
Un coup de comm'
Le Figaro critique ce qu'il considère comme un simple effet d'annonce :
«[L]e projet de révision constitutionnelle ne change strictement rien au droit existant puisqu'il se borne à confirmer que c'est évidemment au législateur qu'il incombe de fixer les conditions dans lesquelles les femmes peuvent recourir à l'IVG, ce qui est le cas depuis toujours. Ce texte de pur affichage est donc un élément de communication à destination des militantes néoféministes qui font de l'avortement l'horizon indépassable de leurs 'droits' et rêvent de voir simplement le mot écrit en toutes lettres dans la Constitution. … Les néoféministes ont pour habitude de dénoncer les propos et gestes masculins 'déplacés'. Il faut aussi oser leur dire que l'inscription de l'IVG dans la Constitution est parfaitement 'déplacée'.»
Se protéger des aléas politiques
Rudolf Balmer, correspondant de taz à Paris, souligne l'importance de l'ancrage de l'IVG dans la Constitution :
«Ce qui arrive dans d'autres pays - il n'y a pas qu'aux Etats-Unis que les acquis du droit à l'IVG sont compromis - peut tout à fait aussi se produire en France. Il est possible que le législateur impose des restrictions à cette liberté, voire la supprime tout bonnement, si une majorité réactionnaire arrivait au pouvoir. En France, où un virage à droite dramatique ne peut pas être exclu, ce risque vient d'être circonscrit par le biais d'un ajout à la Constitution. ... Les députés montrent au reste du monde comment protéger les droits des femmes face aux aléas de la politique. Pour une fois, la France fait honneur au rôle de précurseur universel qui est le sien depuis les Lumières.»